Construction durable : simple tendance ou levier stratégique pour le BTP marocain ?

Table de matière:

Le BTP (Bâtiment et Travaux Publics) est un pilier de l’économie marocaine. Il génère des milliers d’emplois, façonne nos villes, construit nos infrastructures. Mais il est aussi responsable d’une forte consommation d’énergie, de ressources naturelles (eau, sable, gravier) et de déchets de chantier.

Avec l’évolution du climat, la raréfaction des ressources, et les nouvelles exigences réglementaires, la construction durable devient une priorité nationale. Elle est déjà intégrée dans la stratégie de développement durable du Royaume, et soutenue par des politiques telles que la Stratégie Nationale de Développement Durable (SNDD) et la feuille de route pour la décarbonation du secteur.

Dans cet article, nous explorons les enjeux et opportunités de la construction durable au Maroc, en nous appuyant sur des exemples concrets, des solutions à portée de main et des ressources pratiques à télécharger pour les professionnels du secteur.

1. Comprendre la construction durable dans le contexte Marocain :

Construire durablement, c’est penser un bâtiment sur tout son cycle de vie, depuis la conception jusqu’à la déconstruction, autour de trois piliers :

Environnemental	Économique	Social
Réduction des émissions de gaz à effet de serre.	Réduction des coûts d’exploitation (énergie, maintenance).	Amélioration du confort, de la santé et de la sécurité.
Maîtrise de la consommation d’énergie et d’eau.	Durabilité du bâti = valeur accrue dans le temps.	Création d’emplois verts (dans le recyclage, l’éco-construction …).
Réutilisation des matériaux, limitation des déchets.	Réduction de la dépendance aux matériaux importés.	Prise en compte des besoins locaux, culturels et climatiques.

2. Pourquoi la construction durable est une urgence pour le Maroc ?

Le Maroc est confronté à une série de défis qui rendent la construction durable non seulement pertinente, mais incontournable :

• Une urbanisation rapide : plus de 60 % de la population est urbaine, avec une forte pression sur le logement.
• Un stress hydrique sévère : aggravé par les sécheresses répétées.

• Une dépendance énergétique aux énergies fossiles importées, malgré un fort potentiel solaire.
• Une production massive de déchets de chantier, encore peu valorisés.

Mais ces défis sont aussi des opportunités pour repenser notre manière de construire : de façon plus locale, plus durable, plus économique.

3. Utiliser des matériaux locaux, innovants et écologiques

Les matériaux de construction ont un impact direct sur l’environnement, les performances du bâtiment et son coût. Au Maroc, miser sur des ressources locales et naturelles permet non seulement de réduire les émissions de CO₂, mais aussi de valoriser les savoir-faire traditionnels et dynamiser les filières locales.

Voici quelques matériaux écologiques déjà utilisés dans des projets marocains, et parfaitement adaptés à notre climat :

3.1. Terre crue (pisé, adobe, BTC)

Longtemps considérée comme un matériau traditionnel, la terre crue.

Traditionnellement utilisée dans les ksour et villages de l’Atlas et du Sud, la terre crue revient aujourd’hui dans les projets contemporains pour ses qualités thermiques et son faible impact carbone.

• Adaptée aux climats chauds,
• Faible coût,
• Ressource disponible localement dans presque toutes les régions.

3.2. Bois, chanvre, fibres végétales

Le chanvre cultivé dans le nord du Maroc est transformable en béton de chanvre, un excellent isolant. D’autres fibres comme le lin ou les feuilles de palmier peuvent être utilisées pour l’isolation.

3.3. Béton recyclé

Dans le contexte marocain, où le secteur du BTP génère chaque année des millions de tonnes de gravats, le béton recyclé représente une solution efficace pour réduire les déchets de chantier et limiter l’extraction de nouvelles ressources.

Des entreprises marocaines commencent à recycler les gravats issus des démolitions pour les utiliser en remblai ou en granulats dans du béton non structurel.

4. Isolation et performance énergétique : des solutions simples et efficaces

La mauvaise isolation est un problème courant dans le parc bâti marocain, surtout dans les zones urbaines. Il existe pourtant des solutions éprouvées adaptées au contexte marocain :

• Isolation thermique par l’extérieur (ITE) : très efficace pour les immeubles collectifs, elle permet de supprimer les ponts thermiques et d’améliorer le confort toute l’année.
• Ouate de cellulose ou laine de bois : isolants écologiques issus de matériaux recyclés, disponibles localement ou en import à faible coût.
• Double vitrage et protections solaires (volets, brise-soleil, casquettes) : limitent les déperditions en hiver et la surchauffe en été.
• Peinture blanche ou claire sur les toitures : une technique simple qui permet de réduire la température intérieure de 3 à 5°C, soit jusqu’à 30 % de gain thermique dans les zones très chaudes.

Ces techniques, déjà utilisées dans certains projets pilotes au Maroc, peuvent être généralisées dans les constructions neuves comme dans les rénovations, avec un retour sur investissement rapide grâce aux économies d’énergie générées.

5. Exploiter le potentiel solaire du Maroc

Avec près de 3 000 heures d’ensoleillement par an, le Maroc dispose d’un des meilleurs potentiels solaires au monde. Intégrer les énergies renouvelables dans les projets BTP est donc stratégique.

Solutions disponibles :

• Panneaux solaires thermiques pour l’eau chaude (hôpitaux, écoles, logements sociaux),
• Photovoltaïque en toiture pour alimenter les bâtiments publics,
• Mini-stations solaires pour les zones rurales isolées,
• Pompes solaires pour l’irrigation et l’eau potable dans les projets agricoles.

6. Gérer les déchets de chantier : une obligation environnementale

Au Maroc, chaque m² construit génère entre 100 et 150 kg de déchets. Aujourd’hui, une grande partie finit en décharge ou dans la nature. Pourtant, ces déchets représentent un gisement de matières premières secondaires.

6.1. Bonnes pratiques à généraliser

• Tri à la source sur le chantier (bois, plastique, gravats, ferraille),
• Réemploi des matériaux : briques cassées pour les remblais, bois récupéré pour du mobilier ou de l’isolation,
• Partenariats avec les filières locales de recyclage (encore embryonnaires mais en développement dans certaines régions).

6.2. Valorisation : transformer le rebut en ressource

• Gravats broyés : utilisés comme remblai dans les projets routiers ou d’aménagement urbain,
• Bois recyclé : utilisé pour les coffrages, panneaux de chantier ou même comme isolant thermique,
• Plastiques récupérés : certaines start-ups marocaines les transforment en pavés, tuiles ou mobilier urbain.

6.3. Réglementation : une obligation croissante

Le cadre réglementaire évolue :

• Le Code marocain de la construction intègre désormais des obligations de tri et de valorisation des déchets dans les grands marchés publics.
• Le non-respect de ces exigences peut entraîner des sanctions financières ou des refus de réception des travaux.
• Des initiatives sont en cours pour renforcer le suivi via les Plans de Gestion Environnementale des Chantiers (PGEC).

7. Prendre en compte la biodiversité et le paysage

Construire durable, c’est aussi respecter l’environnement naturel et humain autour du bâtiment. Cela passe par une meilleure intégration dans le paysage et le soutien à la biodiversité.

Actions concrètes :

• Toits végétalisés pour réduire les îlots de chaleur urbains (expérimentés à Rabat),
• Création d’espaces verts collectifs dans les quartiers sociaux,
• Intégration paysagère en évitant les ruptures avec l’architecture locale.

Construire avec le paysage, c’est créer des lieux plus durables, vivables et ancrés dans leur territoire.

8. Numérique et innovations techniques

La construction durable ne repose pas uniquement sur les matériaux ou l’énergie. Les outils numériques et les technologies innovantes jouent un rôle clé pour optimiser la conception, la gestion et la performance des bâtiments.

8.1. Exemples d’applications concrètes au Maroc :

• BIM (Building Information Modeling) : modélisation des bâtiments pour mieux gérer l’énergie et les matériaux,
• Construction modulaire : déjà déployée pour des écoles rurales ou des logements provisoires, elle permet un chantier plus rapide, moins polluant, avec un meilleur contrôle des matériaux.
• Capteurs intelligents : installés dans certains bâtiments administratifs, ils permettent de suivre en temps réel la consommation d’eau ou d’électricité, d’alerter en cas de dérive, et d’optimiser la maintenance.

8.2. Une dynamique à renforcer

Bien que prometteuse, l’innovation reste encore marginale dans la majorité des chantiers marocains. Son adoption dépendra de :

• La formation des professionnels aux outils numériques,
• L’intégration du BIM dans les appels d’offres publics,
• Le développement de solutions locales, accessibles et adaptées aux besoins du marché marocain.

9. Former les professionnels : la clé d’une transition réussie

La réussite de la construction durable au Maroc passe avant tout par la montée en compétences des acteurs du BTP. Sans formation adaptée, les meilleures innovations ou réglementations resteront inefficaces sur le terrain.

Besoins prioritaires en formation :

• Utilisation de matériaux locaux et écologiques : terre crue, chanvre, béton recyclé… encore peu connus ou maîtrisés.
• Gestion des déchets de chantier : tri, réemploi, valorisation et conformité réglementaire.
• Intégration des énergies renouvelables : solaire thermique, photovoltaïque, systèmes hybrides.
• Maîtrise des certifications environnementales : HQE, LEED, BREEAM… pour répondre aux nouvelles exigences des marchés publics et privés.

Ces compétences doivent être diffusées à tous les niveaux : ouvriers, chefs de chantier, techniciens, ingénieurs et maîtres d’ouvrage.

AJBTP® au cœur de l’accompagnement des professionnels du BTP

Le Maroc est engagé dans une dynamique de transition écologique, et le BTP doit être au cœur de cette évolution. Construire de manière durable, ce n’est pas seulement bon pour la planète : c’est aussi rentable, innovant, et mieux adapté à notre climat et nos ressources locales.

Des solutions concrètes existent déjà sur nos chantiers, dans nos quartiers, dans nos écoles. Il ne manque plus qu’un élément essentiel : la volonté collective de transformer notre façon de bâtir.

Donc, chez AJBTP®, nous sommes convaincus que cette transformation passe d’abord par la formation, l’accompagnement et le partage des bonnes pratiques. Et nous développons des formations sur mesure, accessibles partout au Maroc et dans le monde, pour accompagner cette transition. Nos programmes allient :

• Contenus techniques à jour,
• Études de cas locaux,
• Pédagogie adaptée aux professionnels du terrain.

10. Ressources à télécharger